Toute personne ayant un jour joué en écran scindé à un jeu compétitif a connu la difficulté d’empêcher la triche. Un simple coup d’œil sur un écran adverse et l’on connaît sa position. Il est difficile de lutter contre, et cela peut parfois rendre des parties insupportables. Plutôt que de tenter d’éliminer ce défaut Screencheat a décidé d’en faire le cœur de son jeu. 

L’objectif de base du jeu de Samouraï Punk est de tuer ses adversaires invisibles. Le seul moyen de connaître leur position est de regarder leur écran. Lorsque l’on connaît bien un jeu et les cartes il est aisé de s’y repérer. Le problème étant ici de permettre aux joueurs, même novice, de rapidement prendre leurs marques. Pour pallier à cela les développeurs ont mis en place d’importants repères visuels.  

Trouver ses ennemis

L’élément majeur pour se repérer est la couleur. Les cartes sont séparées en plusieurs zones colorées. Ces zones peuvent représenter un étage, un côté de la carte ou encore des points précis. Cela permet aux joueurs de connaître le lieu approximatif d’un ennemi en très peu de temps. Ainsi ils savent s’ils sont en danger en voyant sur un écran une couleur identique à celle dominant le leur. Ou au contraire, ils peuvent choisir une cible et savoir vers quelle zone se diriger.  

Une fois proche de sa proie, le prédateur peut déterminer plus précisément sa position en utilisant les éléments du décor. Un tableau, un tapis ou encore une statue trahissent la position des joueurs. Ces éléments distinctifs sont peu nombreux et tous différents. Aucun objet en double n’est présent pour berner l’attaquant et le faire aller au mauvais endroit. Les joueurs peuvent se servir de ces éléments pour attirer dans des zones recluses leurs adversaires et les tuer dès leur arrivée. D’autres tentent de se cacher dans des endroits importants en regardant le sol, laissant pour seule information la zone où ils se trouvent. Ils n’ont alors qu’à attendre que les autres arrivent dans la même partie de la carte qu’eux et déduire, grâce au décor, leur position exacte. Comme une bonne partie des techniques du jeu, c’est à double tranchant. Ceux la pratiquant sont des victimes faciles pour ceux ayant regardé leur écran au moment où ils se cachaient.  

Une fois suffisamment proche et sûr de la positon de leur adversaire ils peuvent dégainer. Lorsque les joueurs ont connaissance d’être visé ils sautent dans tous les sens rendant tout tir précis impossible. L’arme principal du jeu possède une forte dispersion mais une courte portée, elle est donc idéale dans ce genre de combat où les deux joueurs sont proches l’un de l’autre. Cependant ce n’est pas toujours suffisant, dans ce cas une nouvelle aide visuelle entre en jeu : les traînées des balles. Chaque tir envoie un signal aux autres joueurs permettant de déduire précisément la place du tireur tout en restant concentré sur son propre écran. De cette façon les combats intenses durent rarement plus de quelques secondes.  

Toutes ces indications visuelles facilitent la « triche », elles sont présentes sur toutes les cartes et tous les modes de jeu proposés. Cependant dans certains modes précis de nouveaux éléments font leur apparition. Ainsi, dans le mode « roi de la colline », un carré blanc apparaît au sol pour délimiter la zone de prise de points. Le repérage est alors encore facilité, cette zone étant assez restreinte. Dans le même ordre d’idée, il y a le mode « Piñata » dans lequel le joueur portant la piñata gagne des points. Le porteur est suivi par une traînée colorée. Cet élément le force à rester en mouvement pour que les autres n’aient pas le temps de viser correctement. Il est encouragé à prendre des risques, chaque meurtre effectué à l’aide de la piñata lui rapportant des points.  

Les joueurs 2 et 3 se font face.

Le level design pour aider les joueurs

Connaître la position de sa cible est un début, encore faut-il y accéder avant qu’elle ne soit partie. Screencheat se doit donc en plus de faciliter le repérage, de rendre les déplacements plus rapides. Ce n’est pas la vitesse de notre personnage qui entre alors en jeu mais l’architecture des cartes.

Chaque carte est unique à sa façon. Mais elles ont toutes pour point commun d’être de taille réduite. En plus de permettre d’accéder rapidement à la zone voulue cela permet en peu de temps de connaître les lieux par cœur.  

Bon nombre de ces cartes jouent sur la verticalité. Cela permet aux joueurs en hauteurs de se laisser tomber. A l’inverse, elles proposent parfois à ceux au sol des tremplins ou des raccourcis dans les murs pour accéder rapidement aux niveaux supérieurs. Ces moyens sont aussi bons pour l’attaque que pour la fuite. Personne ne s’attend à ce que quelqu’un lui tombe dessus depuis le deuxième étage. Et inversement qu’une personne sous lui quelques instants plus tôt arrive dans son dos. Dans ces moments il faut parfois fuir pour avoir le temps de déterminer la position de son adversaire. De courtes courses-poursuite se créent alors finissant le plus souvent en duel mortel. D’autres peuvent se servir de ces moyens pour tendre des embuscades notamment à la sortie des raccourcis dans les murs. Tout cela oblige à rester constamment à l’affût. Il n’existe pas de lieu sûr ou il est possible de savoir d’où arriveront les autres. Durant une partie il n’y pas de temps mort, en conséquence elles ne durent que quelques minutes pour permettre aux joueurs de faire des pauses.  

Certains niveaux se démarquent des autres notamment en proposant une arène sphérique jouant sur la gravité ou en ayant un grand espace vide central. Ces cartes poussent les joueurs à changer leur façon de jouer et à utiliser des armes différentes. Par exemple, le cheval qui permet de charger ses ennemis est particulièrement puissant sur les arènes possédant de longs couloirs. Le mousquet est quant à lui idéal sur les cartes à l’environnement très ouvert.

Conclusion

Screencheat est à la base un projet de Game Jam (téléchargeable ici). Cela se ressent dans la version finale du jeu. Lors d’une Jam les développeurs se doivent de trouver des moyens simples et efficaces d’atteindre leurs buts, ils n’ont pas de temps pour les fioritures. Les principaux éléments de game design suivent donc cette règle. C’est simple, c’est clair et on prend du plaisir à jouer dès la première session. Bien sûr, le tout a été étoffé, on retrouve plus de cartes, de nouveaux modes de jeu et de nouvelles armes mais le cœur est resté identique. Seul le côté loufoque du titre c’est fortement accentué. L’architecture du premier niveau réalisé (toujours présent dans le jeu) a défini des règles que toutes les autres cartes suivent. Et les repères visuels, déjà présent pour la majorité, ont peu changés. En résulte un jeu qui réussit avec brio à détourner un aspect frustrant des parties en écran scindé pour créer une expérience unique, accessible et amusante.

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